« De l’autre côté »
J’ai toujours fantasmé
D’embrasser le boutiquier
Fascinée par sa devantrine
Ainsi nommée car elle balance
Entre devanture et vitrine
Comme aimantée
Par cette étrange officine
Et son bric-à-brac onirique
Je médite, assise sur le banc de bois
Quel homme se trouvait tapi
Derrière cette flamboyance
J’hésite
Attirée repoussée
Cornes de cerf !
Osons
Entrons
A peine posé le pied
Sur la haute marche du seuil
Me voici littéralement happée
De l’autre côté
Un miroir me tend son tain
Faisant fis du trumeau
Qui grimace à pleines moulures
Une ombrelle en fragile dentelle
Incline ses baleines vers moi
En un arc gracieux
Tandis que deux chandeliers se détournent
Pour ne pas me blesser de leurs bras argentés
Mais dix épées rouillées sautent de leur blason
Et ferraillent sans plus d’attention
Tout ici semble vivant et respire
Objets animés d’âmes
Velours et brocarts enlacés
Lumières d’opale Tiffany
Ombres dragons de chinoiseries
Des reflets dansent
Soulevant des myriades de poussières lucioles
J’hésite
Attirée repoussée
Et voici que la cane au pommeau ciselé
Se soulève et lévite
M’invitant à oser plus avant
Me guide en fil d’Ariane
Vers une table antique
Aux remparts de manuscrits ésotériques
Et derrière eux…
Il est là qui m’attendl »
©Ghislaine Rouxel